mardi 9 août 2011

Nabil, chercheur d'image.



Au printemps passé, le ciné-club Chrysalide programmait un cycle « films de fabrication locale ». J'y ai vu, entre autre, Afric Hotel de Hassen Ferhani et Nabil Djedouani, faisant du même coup connaissance avec ces réalisateurs qui étaient venus présenter leur film. Ce documentaire donne à voir des bribes de vie de jeunes africains en transit à Alger, une ville-étape dans leur aventure d'immigration clandestine. À travers leurs histoires, on découvre les rapports qu'ils entretiennent avec les algérois et se dessine en filigrane une dénonciation du racisme. 
Quelques semaines plus tard, j'ai revu Nabil, le temps d'une promenade, le temps pour moi de le faire un peu parler de lui, son parcours, ses réflexions, ses créations...

Images tirées des films de Nabil Djedouani


Né en 1984, en France, dans une famille d'immigrés algériens, Nabil grandit dans cette ambiance avec une grand mère qui écoutait du Maatoub et un père qui faisait partie des JFLN (Jeunesses du Front de Libération Nationale). Vers 14ans, il se sent submergé par l'Algérie, sans trop savoir comment ni pourquoi, l'envie de connaître ce pays en profondeur le hante désormais. Après le bac, il s'inscrit à la fac de cinéma à Lyon, ce qui lui permet de creuser l'histoire du cinéma algérien. 
Il écrit deux mémoires de recherche : « Le cinéma algérien entre quête d'authenticité et standardisation » et « Crise de la représentation et représentation de la crise dans l'Algérie des années 1990. Le linceul éclairé ». Ses recherches le nourrissent et lui permettent de se situer entant que cinéaste algérien, « pour savoir ce qui a été fait et ce qu'il reste à faire...comment m'inscrire dans tout ça...pour participer à l'évolution du cinéma de ce pays ». Ayant trouvé peu de sources pour alimenter son travail, il décide de faciliter les recherches de ceux qui le suivront dans ce domaine en diffusant le fruit de son labeur dans son blog "Une histoire du cinéma algérien. Mais il ne s'arrêtera pas là, car ayant accumulé une importante documentation, il a pour projet de créer une sorte de bibliothèque numérique des archives du cinéma algérien. Vaste projet qui lui demandera certainement du temps et la constitution d'une petite équipe. « Parce que nous avons eu un cinéma, y a eut un cinéma en Algérie, y a eut des cinéastes et y a des choses à retenir de ces années là et parfois des choses très intéressantes, des choses subversives même et dont on est très loin aujourd'hui où on voit le cinéma algérien tomber dans un discours très mièvre, finalement un discours très tiède. Faut pas tirer un trait sur 40 années de production quand même! ». Dans la logique de son intérêt pour l’éducation à l’image, depuis la fin de ses études il anime des ateliers d'initiations à la vidéo en milieu scolaire et dans les maisons de quartier.
Sa recherche théorique l'amène à la réalisation, il compte aujourd'hui trois courts métrages à son actif : A Tamghart (2005), Aubes Epines (2008), Afric Hotel (co-réalisé avec Hassen Ferhani, 2009).
Début 2010, il crée l'association « Fugues de barbarie » dans le but d'acquérir des moyens techniques pour développer de nouveaux projets de film, de participer à la production et à la diffusion de films en provenance des pays du sud et plus particulièrement du maghreb.
Ses références : Tahia ya didou de Mohamed Zinet (1972), Omar Gatlatou de Merzak Allouache, Le mariage de Moussa (1982) de Tayeb Mefti, Brahim Tsaki qu'il a découvert récemment avec Les enfants du vent (1981), il considère Bled number one (2005) de Rabah Ameur-Zaïmeche comme un « film manifeste », il cite également comme réalisateurs contemporains incontournables : Tarik Teguia pour la fiction et Malek Bensmaïl  pour le documentaire.